the ugly step sister : Comment le patriarcat construit les méchantes ?

l’autre facette du conte de fée

The Ugly StepSister renverse le mythe de Cendrillon.

Elvira, qualifiée de « laide », est finalement intelligente, gentille et résiliente, tandis que Cendrillon elle-même semble vaniteuse et prétentieuse. Ce renversement met en évidence la cruauté sexiste des contes de fées : les femmes sont opposées les unes aux autres, contraintes de choisir entre « jolie » et « laide », désirable et jetable. Le film pose la question suivante :

Et si le véritable méchant n'était pas la demi-sœur, mais le scénario patriarcal qui la présente ainsi ?

LA LAIDEUR DERRIÈRE LA BEAUTÉ

Le parcours d'Elvira vers le bal royal n'a rien d'un conte de fées : elle endure des entraînements brutaux, des régimes douloureux et des procédures primitives qui meurtrissent son corps, mais nourrissent son besoin d'approbation. Sa transformation, forgée dans le sang et la douleur plutôt que dans la magie, redéfinit l'histoire comme une horreur du sacrifice de soi et pose la question suivante :

Jusqu'où iriez-vous pour atteindre la perfection ?

LA COMPLICITÉ DES VICTIMES

Elvira est écrasée par l'exigence de sa mère qui veut qu'elle attire le regard du prince. Sa valeur n'est mesurée qu'à l'aune de l'approbation masculine, révélant ainsi comment le patriarcat dicte la valeur des femmes. Dans Les Origines du totalitarisme, Hannah Arendt montre que les systèmes de domination ne tiennent en place que parce qu’ils parviennent à organiser la complicité de leurs victimes elles-mêmes, les forçant à reproduire les codes qui les oppriment.

LEs femmes jetables

Dans ce monde, celles qui ne répondent pas à l'idéal sont mises à l'écart ou ridiculisées. Les femmes deviennent jetables, leur humanité effacée dès qu'elles perdent leur utilité aux yeux des hommes.

Comme le souligne bell hooks, le patriarcat construit les femmes comme des objets dont la valeur réside dans leur capacité à plaire et à servir les intérêts masculins, si bien qu’elles sont constamment menacées d’exclusion ou d’invisibilisation lorsqu’elles échappent à ces normes.

le personnage oubliÉ

La petite sœur peut être comprise à travers Sara Ahmed et sa figure de la feminist killjoy (Living a Feminist Life, 2017). Là où tout le monde semble accepter les règles du jeu patriarcal, elle brise l’illusion en exprimant son inquiétude et son refus tacite de voir sa grande sœur se consumer pour correspondre à un idéal masculin.

Comme la killjoy, elle trouble la fête, elle introduit une fissure dans le récit dominant en révélant ce que les autres préfèrent taire : la souffrance des femmes et le coût du conformisme. Elle devient ainsi l’incarnation d’une lucidité qui ouvre la possibilité d’une résistance, même minime, dans un monde qui voudrait la réduire au silence.

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